Un nouveau mode de stockage des données en cours d’élaboration au CNRS résoudra-t-il, à terme, le problème de la saturation des data centers ?

Frédéric Hourdeau

News

le 30/05/2015 à 22h10

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Ce procédé, basé sur l’encodage de polymères permettrait de réduire formidablement la superficie et le nombre de data-centers, explique CNRS « Le journal ».

Des chercheurs sont pour la première fois parvenus à inscrire un code binaire sur un polymère synthétique.

A la manière dont l'ADN conserve une énorme quantité de données génétiques (3), une équipe de l'Institut Charles Sadron de Strasbourg (CNRS) et de l'Institut de chimie radicalaire (CNRS/Aix Marseille Université) a synthétisé et lu un message de plusieurs bits sur un polymère artificiel.

Les polymères une solution de stockage prometteuse.

Alors que le volume de données générées chaque année se comptera  selon les experts en zettaoctets (1) d’informations d’ici 2016, une équipe de chimistes du CNRS, menée par Jean-François Lutz, voit dans les polymères une solution de stockage prometteuse.

En inscrivant des informations en code binaire dans la matière-même, elle est parvenue à coder quelques mots au sein des chaînes moléculaires… et entreprend de faire de même pour une phrase entière d’ici quelques mois.

Si une équipe de chercheurs de Harvard était déjà parvenue à encoder sur de l’ADN un livre de 300 pages, l’ADN avait notamment l’inconvénient de ne se conserver qu’en milieu aqueux.

Contourner ce problème serait néanmoins possible selon Jean-François Lutz grâce à l’utilisation de polymères de synthèse, qui sont au cœur de son expérimentation.

« Nous avons développé des polymères sensibles à la température, qui se détruisent à 50-60 °C, explique ce spécialiste des macromolécules. Le principe est le même que sur silicium : pour effacer, on détruit les données inscrites à l’endroit désiré et on va réécrire ailleurs, sur un espace encore vierge. »

Les supports ainsi créés, loin d’être de simples supports d’archivage, seraient ainsi réinscriptibles, à l’instar des disques durs ou clés USB.

L'équipe souhaite stocker des messages de quelques kilooctets, voire mégaoctets, d'ici trois à cinq ans.

Cette technique, brevetée par le CNRS, permet aussi le développement à court terme de codes-barres moléculaires.

Les séquences fourniraient un étiquetage extrêmement complexe à falsifier, idéal pour des produits à forte valeur ajoutée comme les produits de luxe et les médicaments. L'utilisation de monomères (2) et de codes secrets, connus seulement par le laboratoire et l'industriel, rendrait les contrefaçons extrêmement difficiles.

(1)             Dans le domaine logiciel, il est encore fréquent d'employer le terme zettaoctet (1 000 000 000 000 000 000 000 octets) Zo  à la place de zébioctet (1 180 591 620 717 411 303 424 octets).

kilooctet              ko           10 puissance  3

mégaoctet          Mo         10                     6

gigaoctet             Go          10                     9  

téraoctet             To           10                   12  

pétaoctet            Po           10                   15

exaoctet              Eo          10                   18

zettaoctet          Zo          10                  21

 

Un zettaoctet est un terme qui permet d'indiquer le nombre d'octets contenu dans une donnée ou un programme informatique et qui correspond à un trilliard d'octets.

(2) Un polymère est une succession de petites molécules associées les unes aux autres, les monomères.Pour inscrire de l’information sur cette longue chaîne, il suffit de donner à chaque monomère(*) une valeur donnée, 0 ou 1.

(*)Le mot monomère vient du grec monos, un seul ou une seule, et meros, partie.

En chimie, un monomère est une substance le plus souvent organique utilisée dans la synthèse des oligomères et des polymères au cours d'une réaction d'oligomérisation ou de polymérisation.

 Molécule utilisée pour la synthèse des polymères pouvant être associée à une autre molécule identique (= dimérisée), à deux autres identiques (= trimérisée), à une dizaine de molécules identiques (= oligomérisée) ou à plusieurs centaines de molécules identiques (= polymérisée).

En biologie, un monomère (ou sous-unité) est l'élément constitutif des protéines multimériques telles l'hémoglobine.

(3)         Voir notre précédent article :

04/02/2013 - Conservation de données informatiques : De l'ADN artificiel pour stocker des données informatiques