Au moment où, dans certains milieux, et, dans le cadre certains programmes électoraux, on évoque la destruction d’emploi et la taxation des robots qui en sont à l’origine, il est intéressant d’écouter ce que nous prédisent des spécialistes des nouvelles technologies non directement liés aux milieux industriels, ni politiques.

C’est le cas de Laurent Alexandre, fondateur du site Doctissimo, connu pour ses interventions publications et articles  (notamment Le Monde, le Huffington Post…) ainsi que ses positions sur le transhumanisme.

Si le concept d’intelligence artificielle n’est pas nouveau, les technologies actuelles lui apportent de vastes domaines d’application.

Le développement des technologies mobiles et le de la robotisation nous emmène vers de nouvelles avancées technologiques liées aux intelligences artificielles.

Des intellectuels ont bien compris l’importance de l’IA et surtout les enjeux et impacts qui en découleront pour nos sociétés.

Laurent Alexandre, dans une de ses interventions filmée au Sénat, ouvre des pistes permettant de mesurer l’impact de l’intelligence artificielle sur l’économie et l’emploi : à quoi ressemblera le travail dans un monde de nouvelles technologies ?

Il semble urgent de prendre la mesure de l’ampleur de cette révolution.

ð  Résumé de la présentation de Laurent Alexandre au Sénat le 19 janvier dernier : « Les conséquences de la robotique sur le travail ».

(Voir vidéo) : https://www.youtube.com/watch?v=rJowm24piM4

Le futur dominé par des robots, n’est pas pour tout de suite. Néanmoins, l’enjeu de ces nouvelles technologies est essentiellement économique. 

Positionnement de l’Europe face aux mutations technologiques liées au numérique. 

En Europe n’avons pas, ou plus, de souveraineté dans le domaine du numérique

L’Europe n’est pas un lieu de création de nouvelles technologies, et nous sommes pris en tenaille entre les « GAFA »  américains et les économies de  la zone Asie-Pacifique qui se trouve confrontée à des contraintes moindres (sans  les règles morales, éthiques et philosophiques dont veulent s’entourer  les Européens) :

« En matière d’intelligence artificielle, nous sommes un pays du tiers-monde.

Nous exportons des spécialistes de l’intelligence artificielle et nous importons toute la journée de l’intelligence artificielle :

65 millions de Français importent de l’intelligence artificielle 180 fois par jour quand ils sont sur leur iPhone ou sur leur téléphone Android. » 

Les 4 grandes caractéristiques de l’économie du XXIème siècle 

L’économie du XXIème siècle s’appuie sur des technologies qui évoluent de manière exponentielle. Elle est donc très imprévisible.

« L’intelligence artificielle va être gratuite relativement par rapport à l’intelligence biologique ».

Cela a des conséquences majeures sur le marché de l’emploi : nous savons que lorsqu’ un bien est gratuit, ses substituts n’ont plus de raison d’être. Il ne subsistera que ceux qui peuvent complémenter l’intelligence artificielle, travailler avec elle ». 

Le travail peu qualifié risque bien d’être remplacé. 

A contrario, la valeur du travail qualifié va monter : en effet il sera complémentaire de l’IA, dont le facteur de production a un coût nul. 

La « plate-formisation». 

L’intelligence artificielle est créée là où il y a beaucoup de données.

Ainsi, même un mauvais algorithme avec beaucoup de data est supérieur à un bon algorithme et peu de data.

En Europe nous n’avons pas cette base de données, que par ailleurs nous nourrissons nous-même gratuitement avec les informations que nous mettons en ligne (photo, vidéos, informations…) 

Les technologies NBIC ne se développent pas toutes au même rythme 

Biologie, recherche médicale, génétique, robotique : dans ces domaines, le progrès n’est pas exponentiel et il est lent.

De plus, un robot, c’est de la mécanique et le prix de la mécanique ne baisse pas. Il progresse donc moins vite aussi à cause de son coût. 

L’intelligence artificielle va réellement modifier le fonctionnement du travail. 

« Les 55 petits génies de WhatsApp ont créé en 4 ans 23 milliards de valeurs, pendant que les 13 000 valeureux travailleurs, ouvriers, contremaîtres de Peugeot dans les brumes du Jura et des Vosges du sud ont créé moitié moins, en faisant les 3-8 depuis plus d’un siècle. »

La paupérisation relative guette donc nos sociétés en Europe. 

Quelles tâches pour quels hommes avec l’intelligence artificielle ? 

ð  Il faudra être complémentaire de l’intelligence artificielle, faute de  quoi il n’y aura plus s de place pour le travailleur :

« Dans le futur, tous les gens qui ne seront pas complémentaires de l’intelligence artificielle seront soit au chômage, soit avec un emploi aidé. Pas 99% des gens…. 100% ! »

ð  « Aucun emploi non complémentaire de l’IA n’existera en 2050. Par définition. »

-        Les robots pourront remplacer les emplois peu qualifiés.

-        L’intelligence artificielle remplacera les emplois très qualifiés.

ð  Il faudra donc trouver une nouvelle place pour certaines professions,

Même celles, qui demandent une forte qualification : un radiologue, par exemple, sera remplacé aisément par l’IA avant 2030.

ð  L’IA va entraîner la reconversion de métiers à haut contenu cognitif.

« Un médecin quelque soient son expérience ajoutée à ses qualités humaines, ne pourra pas faire le poids face à la masse de données que représentera un patient : 20 téraoctets de données par malade ! » 

« Cela ne veut pas dire que le cerveau biologique n’a pas sa place, mais sa place est profondément transformée. » 

« Un docteur en génomique à Bengalore coûte à l’heure trois fois moins cher qu’un ouvrier spécialisé aux 35 heures en région parisienne. C’est une situation qui ne durera pas, dans les deux sens. »

Avec ces modifications du travail qui se profilent, et ce risque de voir des emplois peu qualifiés disparaître, on comprend que le travail de reconversion et de formation va être long et difficile. 

Y a-t-il une réponse politique ? 

Face à la proposition de Benoît Hamon de revenu universel, Laurent Alexandre met en garde :

«Le revenu universel de base est absolument suicidaire. Je pense que les gens qui le promeuvent comme Hamon sont les « idiots utiles » d’une intelligence artificielle. (…) » (sic)

« Si tous les gens qui ne sont pas complémentaires de l’IA, on les met sur le côté, on leur donne des jeux et du cirque, dans 50 ans on a Metropolis et dans un siècle on a Matrix ». 

Un travail de reconversion et de formation considérable. 

« Il faut que l’on se batte jour et nuit en réformant l’éducation et le système professionnel pour assurer la complémentarité des travailleurs, quel que soit leur niveau de qualification, avec l’IA.

Sinon ce sera  un suicide collectif et c’est de l’irresponsabilité politique. Et pas seulement des politiques : c’est une irresponsabilité politique de l’ensemble de la société civile. »